Je ne sais pas s'il vous arrive de lire des extraits du rapport de la cour des comptes, mais ça vaut le coup.Elle a un rôle de contrôle des comptes, d'analyse des politiques publiques et de conseil. Mais ne peut formuler aucune sanction . En conséquence. La cour des comptes dit, le gouvernement répond et se justifie et chacun rentre chez soi jusqu'à l'année prochaine.
Dans son rapport annuel on apprend des choses passionnantes. Par exemple que la contribution aux charges de service public CSPE qualifiée par le Conseil d'État du joli nom "d'imposition innommée" est incorporée à notre facture d'électricité sans y figurer, alors que normalement elle devrait se trouver dans notre taux d'imposition et que ces charges "ont augmenté de manière incontrôlée depuis 2009 alors que le taux est inchangé depuis 2004 d'où un déficit en augmentation exponentielle ( 2,6Millions € en 2010) " Ce qui forcément va se retrouver sur les facture à un moment ou à un autre "S'agissant de l’insuffisance de la contribution au service public de 1'électricité, depuis 2009, par rapport aux charges à couvrir, la Cour souligne à juste titre la très forte progression des charges (+ 29 % entre 2004 et 2009), du fait notamment de la rapide montée en puissance des obligations d'achat de l'énergie photovoltaïque, à des tarifs avantageux pour les producteurs. Cette progression des charges à couvrir a été sans commune mesure avec la progression de la CSPE censée les financer et dont le taux est resté inchangé depuis 2004
EsT également stigmatisée la gestion calamiteuse de la campagne de lutte contre la grippe A. . La cour des comptes dénonce une stratégie vaccinale trop ambitieuse et non évolutive et indique que La mise en œuvre pratique de la stratégie de vaccination s’est appuyée trop exclusivement sur des centres ad hoc, a mobilisé un système de bons de vaccination peu efficace et a conduit à un gaspillage de ressources humaines dans les centres. La cour des comptes dénonce également une décision de lancement de la campagne prise sans révision de la stratégie. Bref 94 millions de doses achetées même si certaines livraisons ont été décommandées et des stocks refilés à nos voisins, finalement 662,6millions d'euros dépensés pour pas grand-chose pour un prix de livraison des vaccins de 383 millions d'euros. au total, dit la cour des comptes le coût de la campagne de prévention contre la grippe A(H1N1) a été particulièrement élevé puisqu’il a atteint plus de 110 € par personne vaccinée. Le miracle, c'est que cette histoire n'ait pas particulièrement ému l'opinion.
La cour des comptes cible le peu d'équité de la prime pour l'emploi : " la prime pour l’emploi, ( est) une dépense fiscale aux objectifs de plus en plus confus. La PPE peut être versée à des ménages dont les revenus se situent nettement au dessus de la moyenne. A l’inverse, elle exclut les plus pauvres et les personnes en situation précaire au regard de l’emploi. Elle n’est donc pas bien adaptée du point de vue de la redistribution des revenus. Cette absence de ciblage ne lui permet pas non plus d’avoir un véritable effet incitatif au retour à l'emploi, son montant restant insuffisant malgré une forte augmentation. En outre une partie des salariés précaires et à temps partiels qui devraient être particulièrement incités au retour à l’emploi ne bénéficient pas de la mesure.
on apprend en outre ce que sont les dépenses fiscales : ce sont des pertes de recettes directes résultant des dérogations fiscales. Elles sont parait-il considérables. Par extension, l’expression désigne, plus largement, les dérogations fiscales à l’origine de ces pertes de recettes. Il s’agit de dispositions législatives dérogatoires par rapport aux normes fiscales de référence. Les dérogations peuvent prendre des formes diverses : taux réduits d’imposition, exonérations, abattements sur le revenu imposable, déductions de charges, réductions et crédits d’impôts.Le terme "niche fiscale" est également utilisé pour désigner les dépenses fiscales. . Le coût des dépenses fiscales a augmenté de 43 % de 2004 à 2009, hors mesures de relance. S’il avait crû au même rythme que les recettes fiscales, le déficit de l’Etat serait inférieur de 27 Milliards d€.
parfois la cour des comptes se permet un trait d'humour un peu grinçant :, par exemple au sujet du musée national du sport : "En l’absence d’une réflexion stratégique sur sa nature et son devenir, le musée national du sport a présenté pendant la période récente la particularité d’être un musée public sans galeries permanentes, sans tutelle effective de l’Etat, sans personnel adapté, et finalement sans public, puis qu’il n’ est pas possible d’ accéder normalement à sa collection. ( 0,05 % des collections sont accessibles)
En revanche ne sont pas stigmatisés les coûts provenant de ce qu'on appelle les "comités Théodule" par référence à une expression gaullienne. C'est-à-dire des commissions ou instances consultatives placées directement auprès du premier ministre et des ministres et qui ont été créées en grande partie pour occuper les temps libres de quelques personnages de la république en stand -by. Le CAS Conseil d'analyse de la société dont Luc Ferry est le président délégué fait partie des comités Théodule. Bien sûr, sur les 697 structures de ce genre certaines sont utiles et efficaces et d'autres de formidables planques rémunérées ou non mais qui offrent tout de même quelques avantages. Elles auraient coûté aux finances publiques en 2010 25 millions d'euros sans compter un certain nombre de dépenses non comptabilisées. Le plus connu et le plus recherché c'est le CESE, Conseil Économique , social et environnemental organisme consultatif ( 3767 euros brut mensuels) qui comprend 223 conseillers censés se faire mousser la cervelle afin de conseiller le gouvernement et le parlement, contribuer à l'évaluation des politiques publiques à caractère économique social et environnemental et contribuer à l'information des citoyens. Afin d'éviter à certains commentateurs de ce blog de défourrailler leur durandal, je précise que toutes ces niches à glandeurs existaient déjà sous Chirac et Mitterrand qui en faisait un usage éhonté. Il avait nommé la veuve de coluche, l'humoriste Pierre Douglas, l'actrice Brigitte Fossey et la chanteuse Georgette Lemaire dans quelques unes de ces officines. Malheureusement sous "la republique irréprochable", ça ne s'est pas du tout amélioré.
source : Rapport de la cour des comptes 2011. Nouvel observateur du 23 au 29 juin 2011