L'enseignement de la morale à l'école. Délicat sujet. Quelle morale d'abord ? La morale catholique ? La morale musulmane ? Celle du décalogue ? La morale laïque nous dit-on. Celle qui peut faire consensus qui serait le plus petit dénominateur commun, le point de convergence entre les différentes morales et qui pourrait définir des règles élémentaires du "vivre ensemble".
En quoi la morale enseignée à l'école pourrait-elle être compatible avec celle enseignée dans la famille qui est la balise sur laquelle se fixent les enfants comme la moule sur le rocher ? Quelle compatibilté entre les préceptes des religions et celle d'une morale commune à tous, entre la charité et la solidarité, entre le voile et le respect de la femme considérée enfin comme citoyenne à part entière ? C'est bien là le problème.
En quoi la morale des Lequesnois bien sous tous les rapports, hypocrite et amidonnée, est elle supérieure à celle des Groseille adeptes du système D, qui crachent sur le poste de télé mais chez qui on sent une vraie tendresse, une vraie solidarité familiale aux antipodes de l'attitude mécanique des Lequesnois ?
Une des règles d'or qui devraient permettre ce fameux vivre ensemble, c'est le respect des autres, a priori, avant toute évaluation qui peut conduire dans les faits et à juste titre à placer ces autres sous la toise, en mettant un bémol à l'empathie de principe.
Les comportements de la rue m'offusquent souvent quand je vois des adultes, pas forcément jeunes d'ailleurs, me passer sous le nez ou m'écraser les pieds dans le tram sans s'excuser, ou des gosses assis sur les banquettes de ce même tram qui pour rien au monde laisseraient leur place à une personne âgée et qui baissent la tête ou regardent ailleurs pour ne pas être confrontés au problème. Pourquoi cela m'offusque-t-ll ?: Parce qu'on m'a enseigné le contraire et si je ne l'ai pas toujours respecté à 100% je constate que confronté au réel , au temps qui passe et à l'expérience, cet enseignement continue de me paraître juste et susceptible d'être fructueux.
L'excuse, le remerciement , la politesse élémentaire qui marquent que l'on se soucie de l'autre sont devenues souvent des attitudes ringardes. C'est dommage et cela démontre qu'en dehors de la croissance et du pouvoir d'achat dont l'augmentation considérée comme la panacée universelle ne règlera pas tous les problèmes sociétaux, notre société va mal, que la mécanique grince et qu'il est temps d'introduire une dose de morale dans ses rouages pour arriver à un début d'harmonie.
Comment arriver à enseigner une certaine morale à l'école qui serait la traduction dans les faits d'une éthique commune à tous, quand on contemple cette société qui démontre au quotidien qu'elle est tout sauf morale et qu'elle ne va pas vers le mieux ?
Dans cette société du "chacun pour soi" où des footballeurs richissimes mais pauvres en neurones roulent en Ferrari et se comportent comme des gosses capricieux, où la "République exemplaire" ne l'est toujours pas, où les traders sont devenus des héros modernes, où les hommes politiques de gauche, de droite ou du centre égrènent des promesses qu'ils savent à l'avance qu'ils ne tiendront pas, où les gros banquiers sont appelés à présent des "banksters" sous le regard impuissant des gouvernements, où un citoyen américain, qui vient de récolter 335 millions de dollars au loto, gémit parce que le fisc américain lui en enlève la moitié, ce qui, si vous voulez bien faire le calcul, ne lui laisse en gros que 168 millions de dollars, une misère , comment l'équité, la solidarité, le respect de l'autre, valeurs morales en très forte baisse, ne feraient-elles pas hurler de rire.