Ce matin, en marchant, je suis passé devant une usine abandonnée couverte de tags et de graffs. Tous les tags et tous les graffs disent à peu près la même chose : " J'existe bordel !" qui nous renvoie à une solitude ontologique dont chacun se débrouille comme il peut.
Paradoxalement la plupart des graffs à prétention artistique sont construits sur le même graphisme et le même assemblage de couleurs souvent inspirés de la BD et sont donc par conséquent parfaitement conventionnels à l'intérieur d'un genre donné. Il en est de même pour l'habillement et pas seulement celui des lycéens, mais aussi des bobos, des militants, des riches et des snobs en tout genre. En cherchant à se démarquer par l'appartenance à un groupe et une reconnaissance de ce groupe, ( tous les architectes s'habillent en noir !!) il tombent la tête la première dans la convention qu'ils abhorrent. Finalement, les électrons libres du genre Jacques Higelin ou Brigitte Fontaine ( qu'on aime ou n'aime pas, là n'est pas le sujet), n'appartiennent à aucune catégorie bien définie et ont consciemment ou non construit leur vie, comme une œuvre d'art, sans cette auto-censure dont l 'absence désigne les véritables artistes.
Mais, ne nous y trompons pas, il existe aussi des gens, j'en connais, qui, par pudeur peut-être ou refus de l'exibitionnisme, ne se distinguent à première vue de la masse ni par leur comportement ni par leur look. Ils possèdent cependant en eux cette petite graine, d'originalité, de folie, d'esprit libertaire, de résistance, de libre arbitre, que ni les conventions, ni la médiocrité grise de la vie ordinaire, ni la tendance d'une société à vouloir les fondre dans le même moule, dans la pensée unique dénoncée par notre président alors qu'il en est l'un des meilleurs dispensateurs, ne parviennent à dénaturer. Qu'ils en soient remerciés.