Dans " À un ami israélien " paru en mai, Régis Debray s'interroge sur le conflit israélo-palestinien. La-dessus, il y eut l'affaire du bateau humanitaire turc arraisonné en direction de Gaza. Que n'avait-il fait là, le malheureux Régis ! Les pro-Israéliens lui sont tombés dessus comme des écoliers sur un "nouveau" au mois de février dans la cour de récré .
Rien à faire ! essayer de comprendre une situation au-delà des idées reçues ( quitte à commettre des erreurs de raisonnement) propulse celui qui se questionne dans un camp ou dans un autre. Celui qui tente d'analyser une situation au bénéfice du discernement est voué aux gémonies de l'un ou l'autre camp et à la suspicion des petits malins qui sont sûrs de leur fait et se rengorgent dans leurs certitudes avec un unique credo : "Celui qui n'est pas avec moi est contre moi"
Ainsi, impossible d'échapper à la grave accusation d'antisémitisme si l'on émet un semblant de critique sur un homme qui se trouve être juif ou un israélien, impossible d'échapper aux foudres des pro-palestiniens assorties d'un soupçon de racisme si l'on s'avise du moindre point de vue négatif sur Gaza, de la moindre nuance, du moindre bémol. Il faut choisir inconditionnellement entre deux légitimités affirmées, avoir un cerveau ordonné comme les cases d'un échiquier, sous peine d'être accusé d'être un con ou un traître.
Juifs et Palestiniens : deux sujets sur lesquels il vaut mieux fermer sa gueule et foncer aux abris. Pour le reste, le libre-arbitre peut s'exercer sans trop de dégâts, par exemple sur la meilleure manière d'éliminer sans inconvénients les taches sur un canapé. Il vaut mieux être accusé d'être anti-tache ou pro-canapé, c'est moins dommageable.
Nous vivons dans un monde de factions, de clubs, de clans , de partis ( pris), de cénacles, de chapelles, de religions, de confréries, de coteries qui par nature ignorent, excluent, méprisent ou détestent tous ceux qui n'en font pas partie au nom de leur raison qui est plus raisonnable que la raison des autres. Comment expliquer autrement le succès du Football qui pousse jusqu'à une exacerbation himalayenne, la mauvaise foi et l'esprit de clocher chanté par Léon Zitrone à l'époque d'Interville. le bon Léon le considérait comme la plus enviable des vertus ! Michel de Montaigne, catholique qui essayait de comprendre les protestants et de concilier son clan avec le leur, à une époque où ce n'était pas de saison, serait effaré de constater à quelle vitesse d'escargot avance l'esprit humain... quand il ne rebrousse pas chemin !
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